L'ascension

Biélorussie, Seconde Guerre Mondiale. Tandis qu’avance l’armée allemande sur le front russe, deux partisans soviétiques partent dans la forêt afin d’assurer le ravitaillement d’un bataillon.

Figure majeure du cinéma soviétique, Larissa Chepitko (Les Ailes) réalise une œuvre grandiose, qui commence comme un film de guerre à la William Welman (Bastogne) et petit à petit, vire vers l’allégorie sur l’honneur, la survie et la rédemption. Un chef d’œuvre du cinéma russe, qui dut passer sous les fourches caudines de la censure soviétique, et remporta l’Ours d’or à Berlin. Décédée tragiquement lors de la préparation de son film suivant, Chepitko laisse derrière elle l’une des plus belles œuvres du cinéma soviétique.

Philippe Grandrieux

Je n’ai vu le film qu’une seule fois. Il m’a ébloui. Les larmes sont venues dans le tintement des cloches, à la toute fin. Impossible de les contenir. Quelque chose avait soudainement lâché, libérant des pleurs d’enfant. Je suis sorti de la salle, chancelant. Le ciel gris chargé de neige avait éclairé de sa lumière exténuée le chemin obscur des hommes. Leurs actes confus, brutaux, et la peur qui conduit tout, avaient décidé des images, à moins que ce ne soit l’inverse, que ce soit les images précisément qui aient rendu possible ce monde incertain dans lequel ces hommes, le temps du film, affrontant la mort, choisissant l’abjection ou le courage, ont été nos prochains. Si cet homme qu’une charrette transporte vers la mort, à travers les grandes plaines Bielorusses, nous semble emporté, c’est d’avoir le visage renversé dans le paysage, alors que le ciel et lefleuve et les champs de neige s’effilochent, issus de son crâne, dans le tremblement d’un rêve cotonneux. Cette image particulière, voulue, désirée, accueillie, par Larisa Shepitko, bien plus que tout autre chose, emmène cet homme, engoncé dans son lourd manteau, à son destin. Ainsi s’assemble en nous le temps de la projection, d’une image à l’autre, ce que nous ne savons pas. C’est là que se tient le cinéma. Il nous donne à éprouver notre propre obscurité par le monde sensible qu’il projette face à nous. Alors nous pouvons, à notre tour, autrement, ailleurs, être celui que l’on emporte, et dans la lumière qui se rallume, se relever ruisselant de larmes.

Voskhozhdeniye. 1977. Noir et blanc. 111mn. VOSTF. URSS. Drame.
Réalisation: Larissa Chepitko. Production: Willie Geller. Scénario: Yuri Klepikov, Larissa Chepitko. Montage: Valeriya Belova. Photographie: Vladimir Chukhnov, Pavel Lebeshev. Musique: Alfred Schnittke. Avec: Boris Plotnikov, Vladimir Gostyukhin, Sergei Yakovlev, Lyudmila Polyakova.
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