Il n’y aura plus de nuit propose un montage de vidéos thermiques enregistrées par les armées américaine et française au Moyen-Orient... Celles où l’on cherche l’ennemi à tuer et où l’homme n’est plus qu’un point noir dans les ténèbres. En voix off, les mots interrogent les images...

On se souvient de Good Kill (2014) d’Andrew Niccol qui évoquait la manière dont les pilotes de drone, entraînés à tuer les talibans depuis les États-Unis, étaient recrutés parmi les virtuoses de jeux vidéo en réseau: la mort assimilée à un clic. Tout en saisissant la beauté de ces images abstraites qui finissent par ressembler à d’étranges tableaux mouvants, Eléonore Weber poursuit ce constat terrifiant d’une déshumanisation universelle dans laquelle on n’assassine plus des individus, mais l’on atteint des cibles. Que se passerait-il en effet si le tireur était mis face à un visage ? Il est invité à rester aveugle à l’essence même de son acte, à l’ignorer. Pourtant, on entrevoit dans ces formes qui courent la peur qui les étreint, avant qu’ils ne tombent en poussière. Ces lignes de mire et ces timecode soulignent combien l’image ment, déculpabilise, cherche à transformer le tueur ou la victime en machine. Guidé par la voix mélancolique de Nathalie Richard, Il n’y aura plus de nuit constitue un oxymore qui nous livre à la fascination et à l’horreur, et nous invite à ne jamais être dupe, à lire le plus attentivement possible ces images devenues l’apanage de notre quotidien.