Hommage à Bert I. Gordon

Né le 24 septembre 1922 à Kenosha (Wisconsin), Bert Ira Gordon se passionne dès son plus jeune âge pour la science-fiction et les effets spéciaux. Diplômé de l’Université du Wisconsin, il réalise d’abord des publicités pour la télévision avant de co-réaliser avec Tom Grier en 1954 Serpent Island. Seul à bord sur King Dinosaur (1955), il donne le ton avec cette première incursion dans le gigantisme, où un iguane joue le dinosaure du titre. Il poursuit fidèlement dans la même voie, consacrant la moitié de sa filmographie à cette passion en commençant par Le fantastique homme colosse (1955), première collaboration avec l’American International Pictures qui aura un tel succès qu’il en réalisera la suite. Créatures géantes ? Individus réduits à la taille de poupée? Que des êtres agrandis démesurément terrifient les héros, ou que miniaturisés, les humains se retrouvent confrontés à l’immensité de leur environnement, Gordon réinvente avec des budgets miniatures les mirages grâce aux rétroprojections, aux maquettes, aux marionnettes.

En référence à ses initiales et à ses obsessions, il fut surnommé Mr B.I.G par Forrest James Ackerman. Gordon fera quelques infidélités à son thème de prédilection, avec des comédies érotiques anodines, de belles incursions dans la sorcellerie (Necromancy, The Coming) ou en signant un polar remarquable (The Mad Bomber). N’oublions pas le superbe Picture Mommy Dead (1966), fascinante rêverie gothique pleine de perversité implicite. Même lorsque la période est révolue, il reste irrésistiblement attiré par ses anciennes amours et réadapte (librement) encore deux fois son idole H.G. Wells, après Village of the Giants dans Soudain Les monstres (1976) et L’empire des fourmis géantes (1977). Il connaîtra d’ailleurs une longévité artistique plus spectaculaire encore que Roger Corman, puisqu’en 2015, alors âgé de 93 ans, il offrira encore un classique mais réussi Secrets of a psychopath. Avec un aplomb admirable, Bert I. Gordon poursuit jusqu’au bout sa démarche candide, comme si l’émerveillement du gamin à qui on offrait sa première caméra à 9 ans s’était maintenu jusqu’à sa mort, en mars 2023. Il avait 100 ans.